10 décembre 2006

Poèmes d'outre temps : Wanderer et la maison de thé

En fouillant dans de vieux papiers je suis tombé par hasard sur quelques poèmes dont je pensais m'être débarrassés depuis plus de huit ou neuf années. Bien que je n'écrive plus de poésies depuis toutes ces années, je suis malgré tout touché par ce poème "revenant" qui traite du thème de l'errance à une époque ou je ne connaissais pas Gusto Gräser. Etrangement ce poème est intitulé : wanderer ( vagabond), et se déroule dans une Thuringe intemporelle...
Le côté "fin de siècle" ( forcément) et l'ambiance morbide me fait bien rire aujourd'hui... Mais pourquoi pas ? Il fallait bien passer par là !



















WANDERER

Un train résonne dans ma tête
Le quai est vide à la gare de Saint-Gall
Un espion est assis, presque amical

Un bleu de Prusse derrière ses lunettes de fer
Est-ce une ombre ?
Comme ce train qui résonne
Draisine fantôme qui hurle dans ma tête ?

Par la fenêtre, j'ai tendu mon bras
Pour toucher le Danube et le galbe d'un sein
Une courbe hermétique à l'aube dorée

Où ma main ressemble à celle du Malin

J'ai rêvé ma chanson à Marienbad
Sur un quai vide de gare
Où une vieille femme malade
Errait, Pythie hagarde
Entre les rames vides

Des esclaves aux regards tristes
Se noyaient dans le Styx
Et la galère aux rames inutiles
Transportait les âmes numérotées
Sous un aveugle crucifix

Un contrôleur à l'accent de Lübeck
Comme un automate mélancolique
M'a demandé mon ticket pour l'Aigle Noir
Avant de me laisser partir sur les routes du soir

Au delà de Thuringe, j'ai été troubadour
Pour un rêve, un conte, une histoire d'amour

Où chaque pas qui m'éloigne de toi
Me rapproche un peu plus de la gare de triage
Où les destins se croisent de l'azur au ponant

Et les machines de rage
Nous laissent vieillissants
Aux portes de la Ville



Un autre poème très "victorien" qui explore le versant himalayen du vagabondage :

















La maison de thé :

Prends ta vieille malle, voyageur
Quelques cachemires
Un gilet aux boutons dorés
Un recueil de Tennyson
Un clipper ou un aéroplane
Et sur ces pentes anthracite
Des contreforts himalayens
Avance sans t'arrêter
Sur ces ponts volants
Au dessus des torrents
Là bas ! Trouve un bosquet de Bactriane
Et choisis dans ton herbier
Entre Passiflore et Aquilea
Effeuille la muse de Darwin
Les rouages bruts du cosmographe
Deviens voyageur de la contre marche
Explore ce temps omnivore
Eloigne-toi des Bosphores cicatriciels
Et fuis ces cités de phosphore
Et sur les sentiers brahmanes
Au doux parfum de bergamote
Tu trouveras, voyageur
Cette vieille maison de thé
Entre Passiflore et Aquilea
Et souviens-toi d'un visage gravé
De gaiäc et de plomb

Au bout du chemin, voyageur
Tu trouveras une maison de thé
Et un visage aimé
Entre Passiflore et Aquilea




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