Cette photo résume toute l’horreur de notre époque. L’homme est en pleine page d’un numéro du Figaro Magazine. Le paysage est celui d’un désert californien. Un sentiment d’obscénité m’étreint. Cette photo me dégoute, je veux détourner la tête, mais il est trop tard. L’homme est vêtu d’une combinaison blanche immaculée de peintre en bâtiment, il écarte les jambes, les pieds chaussés de Rangers militaires, poussant son bassin vers l’avant afin que le spectateur pose son regard vers sa braguette à la boursoufflure évidente. Il a les bras sur les hanches dans la position du dominant qui vous toise avec le mépris du surhomme. Je repense alors au poème de Paul Celan dont la lecture me tire encore les larmes. « Lait noir de l’aube, nous te buvons... ». Face à cette image du « maitre » hier comme aujourd’hui ... Les lunettes noires énormes, la chevelure blonde longue et frisée vient ajouter un mauvais goût kitch à cette vision d’horreur. La combinaison est ouverte sur un torse bronzé et puissant acquis sur des machines à fonte. L’homme revient 30 ans après. Ce n’est ni un Papillon ni un communard exilé à l’île du diable. Non « ce maître venu d’Amérique » est un petit chanteur de variété. Un faiseur patenté des années 1970. Il ne revient pas avec la hargne et le désespoir d’un Dreyfus, d’un Bakounine ou d’une Louise Michel. Il revient avec la morgue d’un nouveau riche faisant construire une hacienda mexicaine dans son village du Morbihan. « Je suis légion » dit-il, car « je suis partout ». Vous le verrez dans des clips publicitaires arborant un marcel, des biceps ostensibles et un énorme téléphone phallique. Vous lirez ces dépêches pré mâchées dans tous les quotidiens et journaux. Les ondes radiophoniques passant de l’anneau de Moebius à celui de Goebbels, chanteront le messie de la variété. Des journalistes crieront au génie, au retour de l’enfant prodigue. Les Femmes s’arracheront les ovaires sur son passage, les hommes s’émasculeront en l’honneur du demi-dieu. Il revient, et il veut de la chair, du sang et de l’argent. Il veut les royalties des 30 ans d’impatience, des 30 ans de mépris envers ces hommes et ces femmes. Il veut le fruit du malheur, prendre sa part des trente piteuses. Vous n’échapperez pas à son emprise, les étals des librairies arborent déjà des dizaines de livres à sa gloire. Vous achèterez le disque. Vous verrez le film. Un ventre énorme vous digère mais le ver solitaire, le ténia des lazes, veut sa ration de sang, de hype et d’honneurs. « Lait noir de l’aube, nous te buvons... ».
03 mars 2007
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
1 commentaire:
c'est Polnareff je l'ai reconnu. Quel naze ce mec. C'est tout ce que le France ne veut plus.
Enregistrer un commentaire