La metastructure narrative
Je viens de boucler le quatrième « chapitre » de mon projet de roman, ce qui équivaut à 12 779 mots... Il me reste donc encore deux chapitres pour achever la première partie du roman.
Chaque « chapitre » répond à une contrainte narrative inspirée des règles de la biomécanique de Meyerhold. C’est Eisenstein qui avait théorisé ces conceptions en les adaptant au montage cinématographique du cinéma soviétique. Je n’ai aucune information sur l’utilisation antérieure de ce procédé dans le cadre du roman... Quoiqu’il en soit, j’ai adapté ces « règles » à mes propres conceptions romanesques. Il faut dire que suite à l’assassinat de Meyerhold par Staline (voir photo de l'arrestation) et à la difficulté d’avoir accès aux premiers textes théoriques d’Eisenstein pendant plus de 60 ans, la biomécanique de Meyerhold a disparue du champ de la culture occidentale. Ce n’est qu’à la fin des années 1990, par l’intermédiaire de l’universitaire américain Mel Gordon, que la biomécanique à été « redécouverte ».
La biomécanique se veut comme une science du mouvement qui trouve son application dans le jeu de l’acteur, sa manière de se mouvoir, mais aussi dans un cadre plus général, dans l’élaboration d’un langage moderne qui trouve son aboutissement chez Eisenstein
Le mouvement Biomécanique est divisé en 6 phases
1- Le recul : Lors de la préparation d’un mvt dans une direction, le mvt est fait dans un sens inverse. Il s’agit d’une loi fondamentale de la biomécanique.
2- La suspension : un mouvement léger, une vibration survenant à la fin du recul.
3- La fixation : un arrêt imperceptible à la fin de la suspension
4- Micro recul : un mvt inverse réduit dans le temps et l’espace
5- Action : c’est le mouvement libre en tant que tel, résultat des phases antérieures.
Cette « metastructure » doit cependant être suffisamment invisible pour ne pas alourdir la lecture. C’est bien sûr un point de vue subjectif, puisque je considère que de nombreuses expérimentations du « nouveau roman » étaient illisibles. Le seul exemple de réussite est « la vie mode d’emploi » de Georges Perec qui reste encore aujourd’hui la « bible » d’écrivains comme William Gibson ou Chuck Palaniuk , mais aussi de M.G Dantec ( il ne le crie pas sur les toits...), qui utilise la structure des sephirots de la Kabbale chrétienne pour structurer ses récits, avec un échec patent de « Villa Vortex » et une belle réussite de « Cosmos inc. »
Inventer ses propres structures narratives est ce que Henry James appelait « la motif dans le tapis ». C’est la condition élémentaire de tout roman qui tente d’inventer la littérature. Il faut cependant reconnaitre que 95% des romans publiés en France n’ont aucun « motif dans le tapis ». Il s’agit pour la plupart du temps, d’un simple assemblage de phrases, d’une conception accumulatrice de mots qui fabriquent des « pâtés », ou, dans le meilleur des cas, une virtuosité technique de l’impromptu.
2 commentaires:
Déjà ;), je suis seulement en train de réfléchir au Cabinet d'écriture curieuse # 2.
[Quoiqu’il en soit, j’ai adapté ces « règles » à mes propres conceptions romanesques.]
J'ai hâte de voir comment tu vas rendre cette technique visuelle sur le papier.
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