J’ai vu la petite France sous le pont Alexandre III. J’ai vu l’espace étriqué du futur. J’ai vu comment l’homme qui voulait être roi, invitait ses militants comme des chiens. J’ai vu le mépris pour ces hommes et ces femmes qui ont été les petites mains de sa victoire. "Ce soir, mes amis, je vous invite à ma victoire, mais il faut payer... " Drôle d'invitation... J’ai alors vu ces vieilles baronnies de la France passéiste plastronner avec des bouteilles de champagne payées en peccadilles de Gold card. J’ai vu ces vieilles putes fardées à la bourgeoisie poussiéreuse, trimballer leurs vieux ovaires et leurs bijoux de familles. Et puis ce carré VIP, puant de conciliabules pommadés, de petites femmes qui sentent la pisse et de vieux dégueulasses en lavallières et crânes lissés à l’encaustique. Ici et maintenant, on inventait les castes, pauvres militants payant leur picrate d’euros larvés, et ces gauleiters des petites cellules, à qui l’on avait donné des tickets de rationnement brejnéviens pour se niquer les transaminases sans bourse délier. Le « tous ensemble », dès les premières heures, vacillait en « tout mépris ». Une vieille France, comme un lupus antédiluvien, sortait de terre et grouillait à nouveau en chantant la gloire de Charles X. Ici, on n’invite pas, ici les lois de l’hospitalité n’existent plus, non plus la prodigalité des chefs de guerre victorieux. Ici on raque sous un service anémié, sous emploi criant pour un désir illicite de plein emploi. Là, sous les ors du satrape russe, une petite France cloîtrée et clivée, éjaculait son petit lait frelaté. L’avare avait gagné, et Molière gisait dans son sang, les dents brisées. On reconnait un chef à son panache, à sa générosité et sa joie de vivre. Mais rien de tout cela, juste un petit arrêt d’autoroute, un arrêt d’urgence pour turista liquide. Tout juste un mouvement de recul quand ils apprenaient avec horreur que le chef ne payait pas pour la victoire. Mais gare au regard désapprobateur de la fouine visqueuse. Alors, la foule apeurée des militants, sortait en tremblant ses petits billets rouges et bleus... Les cellules ont des yeux. Ici le mot révolte est un gros mot, mais sous d’autres cieux, là ou paissent les nuages noirs de Jean Moulin, la révolte est un honneur. Mais cette vieille tradition française de l’honneur et du courage a déserté ces rivages. Ici, le gendarme est roi tout comme l’envie du pénal. Un ancien régime bureaucratique de fats s’érige sous forme d’un baba au ruhm, mais sans le lyrisme d’un roi soleil ni la désobéissance dédaigneuse des lois par les aristocrates. Mais retour chez l’épicier. Retour chez l’hôte malappris. Ici, c’est une invitation à la ficelle. Qui se souvient du Guépard de Visconti, de la fin d’un monde annoncé par le dernier des hommes, le Prince Salina ? Le temps du petit épicier roublard est venu, l’assiette au beurre est servie. Que Faut-il faire ? disait Lenine. Et puis Salina est devenu Gramsci ou Jaurès. Un doigt se lève toujours. Le doigt du Prince Salina. Mais pendant que l’homoncule de Nietzsche tente de sortir des égouts de Paris, la petite France fait la queue, érection mollassonne, pour se payer un coup de gourdin. En Italie, le poète-soldat Gabriele D’Annunzio avait un nom pour ce genre de politicard : Cagoia. Nul besoin d’explication, le « tous ensemble » se transforme en étron une fois éjecté. Nous n’avons plus de Victor Hugo mais le Badinguet Nouveau est arrivé. Une cuvée jeune et indigeste vendue au plus offrant. On pense à Léon Bloy, en ces moments solitaires « Avouez qu’une Nation qui laisse périr de faim des hommes comme Villiers, Verlaine et tant d’autres, mérite les pires châtiments. » Mais Léon Bloy ne s’arrête pas là, le bougre d’homme, ce mono-hérétique catholique, qui s’enfonce toujours un peu plus en avant dans les sargasses de la liberté intransigeante : « Une douzaine de guillotines fonctionnant sans interruption sur les principales places de ce prostibule qu’est la ville de Paris laveraient à peine un tel forfait, le plus grand de tous, le péché contre le Saint Esprit ». D’un tel nid de guêpes émasculées on se casse, on s’éjecte, on se gerbe, quitte à se la jouer poulbot ou prince Rodolphe des Mystères de Paris, en balançant des vacheries à ces statues de sel. Je ne sais pas si des millions d’homos sapiens sapiens peuvent se tromper absolument mais je sais au moins une chose, qu’un type qui vous invite en vous faisant payer le vin à la ficelle, ne mérite qu’une chose, un gant dans la gueule. Le reste est une question de courage, qui n’est pas partagé, évidemment.
07 mai 2007
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13 commentaires:
L'équipe Sarko n'a pas pigé que ce genre d'évènement meritait un partage, même symbolique, le temps d'une soirée. Faut rien comprendre à la France que de faire raquer les consos pour ce genre d'évènement, et pire, de prévoir un carré VIP. J'ignore encore si c'est le fait du cynisme ou simplement de la betise crasse.
Ce n'était pas comme ça partout... d'autres ont pigé le concept du partage et de l'ouverture
Ce n'était pas comme ça partout... d'autres ont pigé le concept du partage et de l'ouverture
J'y étais c'était tel quel. Minable. En tout cas un mélange de père Goriot et de débilité mentale. Affligeant. Chirac n'aurait jamais fait ça !
Sur place, dans le carré VIP, la RP de Sarko, madame 100 Kilos, qui se justifie en disant:
"on a plus de budget" (?) "mais que de toute façon, c'est normal que les militants paient leurs coups, puisque la plupart n'ont rien fait..."
militer plus, boire plus...
un peur dur mais malheureusement pas totalement faux. C'etait triste de feter ainsi une aussi belle victoire.
Le jour ou les journaux pourront nous sortir des reportages insider de ce type- la liberté de ton qui va avec. Les poules auront des dents. Mais c'est vraiment dommage de gâcher une fête alors que si les choses avaient été plus dignes, je suis persuadé que ce post aurait été différent. C'est bien de savoir qu'il n'y pas que la télé !
Si Mademoiselle Royal avait gagné.
Si Mademoiselle Royal, cette vielle fille un peu putasse, avait gagné, il en aurait été autrement. Ah bon? Bien sur que non. Dans un élan populaire le parti socialiste avait prévu d'inviter 300 apparatchiks (seulement ? oh les pingres) à venir festoyer maison des Amériques Latines. Là aussi, les castes. Les militants ces intouchables, eux, étaient comme toujours invités à joyeusement bleugler dans la rue. A ce propos, on aurait entendu Julien Dray gronder sur le perron un "Mais putain, qu'ils y restent, ils vont pas nous faire chier 107 ans c'est bon à rien!" Thomas Hollande en aurait perdu sa coupe dans un bosquet. Pauvre petit.
Que ce soit à droite comme à gauche, ces couillons de militants l'auront toujours dans l'os. C'est à ça qu'ils servent ces bêtas : amortir. C'est dommage que la droite (centre droit selon la presse chilienne, c'est plutôt marrant ça) s'emmerde à organiser une mauvaise soirée au Showcase. Valait mieux ne rien faire. A gauche au moins, fairplay et démocrate, on organisait des feux de joies dans les centres villes et les banlieues pour saluer la victoire du petit Nicolas. Une grande fête fraternel quoi.
Etonnant, la grosse RP m'a dit exatement la même chose alors que je m'ennuyais ferme dans ce carré VIP. Je lui signalais que ct domage de ne pas avoir fait un OB général et elle m'a rétorqué ; plus de budget (et mon cul c'est quoi ?) et les gens n'ont pas tous mérité...
Entre parenthèse, la RP de Sarko est une ignoménie ambulante, non pas uniquement pour ses 100 kilo, mais à cause de cette voix semie eraillée de jeune brailleuse du 16 ième alliée à cette suffisante du cru. Même un droitard comme moi rêvait à Ségolène ce soir là.
Petit, médiocre,... absolument désolante que cette soirée au Showcase.
Ton texte est d'une hargne justifiée. Nous l'avons mis en ligne sur mixbeat avec un lien vers ton blog.
http://love.mixbeat.com/hype/index.php?option=com_smf&Itemid=238&topic=251.msg31220#msg31220
Et bien, j'ai l'impression que ce petit texte vient d'ouvrir l'ère Sarkozy...
Il y a des détails qui ne trompent pas, des élans positifs ou négatifs qui sont en gestation dans les premières heures... On sent une fatalité comme un drame humain, une impossibilité, une opposition entre le passéisme et la réaction, ces deux mamelles explosives qui se frôlaient sans cesse, dans cet ignoble showcase, mais sans jamais se toucher. La relative modernité de la réaction, cette jeunesse bourgeoise narguant les banlieues pauvres ( pas Neuilly...) et les force passéistes et momifiées de la vieille france sclérosée, ne se retrouvent qu'en surface et s'opposent finalement en profondeur. Le Showcase dans sa spécificité nano-hype n'est finalement qu'un révélateur, le calque d'une fissure plus générationelle que l'on veut bien le dire. lorsque les lendemains déchantent dès le premier soir, c'est mal parti... Je suis persuadé que "personne" n'a passé une bonne soirée au Showcase. Mais si finalement, le Showcase, c'était la France ? La France en modèle réduit et en accéléré... A voir. On préfère se tromper, non ?
Ouaip. J'ai savouré la défaite chez moi, pour pas un rond. Je comprend amplement votre déception. Mais quand on voit que notre Président a pris le temps de se régaler au Fouquet's avant d'aller saluer les moutons à la Concorde, on ne peut pas être étonné de certains réflexes...
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